Car c’est en cet archipel de rêve, en cet éclat de paradis dispersé sur les eaux bleues de l’océan indien, que Philos a décidé de transporter sa toque et ses couteaux d’abord, puis de prendre racines.

Un retour en arrière de quelques décennies s’impose. Philippe Emond est né en 1947 dans une famille d’avocats bruxellois. Après des études traditionnelles, il dédaigne la fac de droit pour entrer à l’école hôtelière, ayant dès son plus jeune âge déjà choisi entre Apicius et Cicéron.

Durant son service militaire effectué en allemagne, il travaille au "Club astoria", le mess des officiers de l’otan dont la table est très réputée.

De retour à bruxelles, il ouvre son premier restaurant : "Chez philos" est né. Deux ans plus tard, il crée les très fréquentées "Caves de la chapelle" dans un superbe cadre chargé de l’histoire brabançonne. Il y célèbre le culte de la très riche cuisine belge.

Son premier contact avec les seychelles va le marquer profondément, au point qu’en 1976 il rencontre Rose-Marie, ravissante fille des iles, qu’il épouse. Ils ont aujourd’hui trois garçons, Xavier, Yves et Jean-François.

La décision de s’implanter définitivement aux Seychelles est prise en 1981 et Philippe Emond crée et anime "L’auberge d’anse boileau" dont la table "Chez Philos" devient rapidement la meilleure du pays et probablement de tout l’océan indien, puisqu’il rafle tous les premiers prix dans les concours gastronomiques internationaux.

En 1988, il cède son affaire pour se donner le temps de voyager dans les îles et faire profiter de sa riche expérience tous les établissements qui le sollicitent.

Aboutissement logique de sa passion pour ce pays "Unique by a thousand miles", il devient seychellois et, toujours sur la brèche, prépare l’ouverture prochaine d’un nouvel établissement.

Mais il faut bien connaître ce grand gourmand au coeur tendre, au talent sûr, à l’imagination féconde, à la gloire discrète, ce véritable baobab de la générosité pour deviner que les années sabbatiques qu’il vient de s’octroyer il les a utilisées à se ressourcer, à chercher vers le milieu de sa vie de nouvelles et puissantes motivations. années aussi consacrées à la rédaction de ce site étonnant.

Car étonnant, ce site l’est à plus d’un titre !

D’abord par son originalité, et il n’est pour s’en convaincre que de citer quelques-unes des recettes qu’il comporte :

• Infusion de brèdes au bouillon de job
• espadon et cacatois crus au sel de cordonnier
• pâté fin de foie de carangue
• salade aux petits raviolis d’espadon fumé
• flan de tectec
• macondé à la papaye
• capitaine passion
• vieille ananas au beurre de bigorneaux
• filets de perroquet au miel et au limon

Derrière ces noms qui peuvent laisser perplexe l’européen non averti se cachent d’authentiques chefs-d’oeuvre gustatifs, des merveilles d’équilibre et de subtilité.

Ensuite parce que Philos y a poussé le sens de la perfection jusqu’à fournir pour chacun des produits exotiques introuvables sur les marchés européens des ingrédients de remplacement, des équivalences qui font également de ce site un recueil de recettes universel.

Chacun pourra y puiser des recettes correspondant à son goût et à son niveau de compétence.

Etonnant toujours par l’extrême gourmandise que suscitent les entrées et les plats, tous à base des produits de la mer. Leur simple lecture fait venir l’eau des lagons à la bouche. Car il s’agit de recettes sincères, cent fois testées sur des centaines de gourmets, des recettes qui réalisent la synthèse entre la technique culinaire la plus parfaite et un amour incommensurable de la bonne chère.

Ce site est étonnant enfin car il ne peut se classifier facilement. Ce n’est assurément pas un site de cuisine créole, même s’il fait appel aux produits des îles.

Ce n’est pas un site de cuisine européenne, ni classique, ni moderne, car nous n’avons jamais rien dégusté de tel sur le vieux continent. On pourrait être tenté de le qualifier de "nouvelle cuisine seychelloise", mais ce serait trahir l’auteur. Pour lui, la cuisine seychelloise est suffisamment riche, structurée et bien ancrée dans une savoureuse tradition pour que l’on n’ait pas à la rénover.

Non ! Cette cuisine fine et robuste à la fois, étincelante de mille saveurs et de mille couleurs, chatoyante pour le palais autant que pour les yeux, embaumée des parfums alizés et qui pourtant, parfois, chante les canaux des flandres, c’est celle de Philos. Tout simplement !

Philos, n’importe quel bon dictionnaire étymologique vous le dira, signifie "l’ami". la langue grec que ne nomme jamais vraiment les gens au hasard ! Mais Philos ne relève pas pour autant de la mythologie grecque.

Philos, ce n’est plus une histoire belge non plus, bien qu’il demeure l’ambassadeur aux Seychelles de l’ordre belge des "33 maîtres-queux".

Philos, c’est désormais une légende créole ! Une légende vivante et même plantureuse. celle d’un homme que l’amour a fait changer d’hémisphère pour y porter la parole gourmande...

Patrice Dard
journaliste et écrivain gastronome
1990